marianne pour les soli

Marianne Peuch-Lestrade et Guillemette Crémèse, élèves en 3ème année à Arts en Scène, prennent la parole pour raconter les soli. Avec sincérité, les deux jeunes femmes font le bilan de cette expérience.

marianne pour les soli

Qu’est-ce que les soli ?

Guillemette : Les soli, c’est une commande d’Arts en Scène faite aux élèves de troisième année. On est 12, on a donc 6 solos à faire, par 2, dans une forme d’environ 20 min. C’est totalement libre : le choix du texte est libre – d’ailleurs ce n’est pas forcément un texte – avec une personne qui met en scène et une personne qui joue. Ce qui est hyper nouveau et intéressant dans cet exercice, par rapport aux spectacles qu’on a déjà fait, c’est qu’on est vraiment seuls, seuls dans notre désir de théâtre, seuls pour décider de ce qu’on a envie de raconter !

Quel était l’enjeu, pour vous, de faire ce travail ?

Marianne : pour commencer, Guillemette et moi on voulait travailler ensemble ; on se l’était dit depuis un moment, mais on ne savait pas sous quelle forme. Et petit à petit, est venue l’idée que Guillemette allait écrire et mettre en scène, et moi, jouer. Le premier enjeu pour moi, c’était de jouer toute seule 20min, ce que n’avais encore jamais fait.

Guillemette : je crois qu’il y avait pour nous deux cet enjeu de première fois ; j’ai déjà joué toute seule, dans un format similaire, mais pour ce travail j’avais envie de m’essayer à la direction d’acteur. Et à l’écriture aussi, car je n’avais jamais écrit pour le théâtre. Pour moi, les soli représentent un énorme espace de liberté, parce qu’il n’y a aucun risque ; on est dans le cocon de l’école. Dans un autre contexte, je pense que je n’aurais pas osé. Il y avait donc cet enjeu de tester l’écriture, mais aussi de voir où on pouvait aller ensemble avec Marianne, trouver notre manière de travailler.

Est-ce que ça vous a plu de travailler ensemble ?

Marianne : Oui (rires), bien sûr. Il y a eu une grosse période de doutes venant de ma part avant les soli, mais après la crise est venu le dépassement ! Personnellement, j’ai énormément appris de cet exercice et je me suis posée beaucoup de questions, notamment sur la place du comédien par rapport à son metteur en scène. Et le projet en lui-même m’a également posé question, car le texte parle de moi, et c’était parfois vraiment difficile : j’étais perdue car je ne savais plus où était la limite entre la fiction et la réalité ; entre moi et le personnage que je joue.

Guillemette, tu as parlé de ton désir de t’essayer à l’écriture ; pourquoi sur Marianne ?

Guillemette : ça peut paraître niais mais c’est quelqu’un que j’aime beaucoup, et elle m’inspire. J’avais envie de la raconter sur scène ; ça m’a inspiré, ça a nourri mon désir d’écriture.

Je me suis inspirée d’un livre d’Annie Ernaux que j’aime beaucoup, « Les années », dans lequel elle décrit des photos d’elle à la troisième personne. Ce qui m’avait frappé dans ce livre, c’est que dans toute son œuvre elle ne parle que d’elle, de sa vie, et pourtant ça me touche profondément, et ça touche des millions de personnes. Je crois que c’est ça qui m’intéresse vraiment, qui me passionne ; où se trouve l’universel dans l’intime. Au début, je ne savais pas trop vers où aller, mais je sentais que je voulais faire quelque chose autour de Marianne, sans trop savoir pourquoi. Ce qui m’a intéressé, c’est de trouver comment parler de petites existences et finalement d’y trouver de l’universel.

Comment vous avez procédé pour l’écriture du texte ?

Guillemette : je lui ai demandé de m’apporter des photos, et on les a regardées ensemble. Elle m’a raconté beaucoup de choses. Puis j’ai écrit, avec du vrai et de la fiction. J’ai écrit le texte seule, bien que toujours en accord avec Marianne, et ensuite on a travaillé ensemble pour peaufiner le texte ; on y a fait beaucoup de modifications, de coupes, par rapport au texte original.

Marianne : elle a modifié plusieurs fois le texte parce qu’elle sentait qu’il y avait des choses qui ne collaient pas dans la forme. Il y avait notamment une scène qui ne lui convenait pas dans la façon d’être jouée, et elle a vraiment réfléchi à la manière de la réécrire, en améliorer l’écriture pour que ça rende quelque chose de théâtralement intéressant !

Guillemette : notre désir commun était vraiment d’approfondir le jeu, donc j’ai beaucoup travaillé le texte dans ce sens-là, pour avoir une vraie matière à jouer.

Marianne, tu as joué ton propre rôle ; comment l’as-tu vécu ?

Marianne : Quand j’ai commencé à avoir des doutes, Guillemette m’a rassurée en me disant qu’il n’y avait que moi qui pouvais prendre la décision de le jouer. J’ai pris le temps de réfléchir, mais j’avais très peur de prendre la décision toute seule. Finalement, j’ai décidé d’aller au bout. Et à partir de là, je l’ai vécu comme un véritable dépassement ! Ça a été incroyable pour moi, une chance extraordinaire. Et plus il y avait de représentations, plus je m’accrochais au milieu de ce marathon complètement fou !

J’ai également compris des choses en tant que comédienne, dans l’engagement et dans l’amusement. Mais j’ai surtout l’impression d’avoir pris ma place, et d’avoir grandi ! C’était vraiment fou, et la magie a opéré. En tout cas, on ne ressort pas indemne des choses pour lesquelles on a donné de soi !

Maintenant que la pression est retombée, que gardez-vous de ce projet ?

Guillemette : c’est une chance énorme d’avoir eu cette carte blanche. Et quel délire de déambuler dans l’école ! Après 2 ans de formation, ça nous a permis d’éprouver notre désir : on a beaucoup réfléchi sur le théâtre qu’on avait envie de faire ! D’ailleurs, les spectateurs nous disaient à quel point les scènes représentaient les univers de chacun !

Marianne : c’était très fort de vivre ça en groupe, alors qu’on était seul sur scène. Paradoxalement, on s’est beaucoup retrouvés en tant que promo, en tant que groupe. On voulait tous raconter des choses différentes, mais les amener d’un point à un autre, ensemble, et j’ai trouvé ça très fort ! Je crois qu’on s’est aussi rendues compte des armes qu’on avait : on peut faire tellement de choses avec peu, on peut faire du spectacle, créer une forme artistique en partant de rien !

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